Le gouvernement français a récemment annoncé des mesures visant à assouplir l’accès au crédit immobilier, suscitant de grands espoirs parmi les acteurs du logement. Cependant, selon Henry Buzy-Cazaux, président fondateur de l’Institut du Management des Services Immobiliers, ces mesures sont en réalité inefficaces et ne résolvent pas les problèmes sous-jacents. Dans une tribune publiée sur Capital.fr, Buzy-Cazaux explique pourquoi ces actions gouvernementales ne sont qu’une illusion et pourquoi il est nécessaire d’adopter une approche différente pour remédier à la situation.
Des promesses non tenues
Les recommandations du Haut conseil de stabilité financière (HCSF), qui limitent le taux d’endettement à 35% et la durée du crédit à 25 ans (ou 27 ans pour l’achat d’un logement neuf), sont entrées en vigueur en début d’année 2022. Bien que les banques aient été autorisées à déroger à ces critères pour 20% de leur production trimestrielle, elles ont peu utilisé cette liberté, ne dépassant que légèrement les 14%. Face à la demande des banques de réviser ces critères restrictifs en raison de l’inflation des taux, le gouvernement leur a opposé le fait qu’elles n’avaient pas pleinement utilisé leurs marges de manœuvre.
Une complexité administrative décourageante
Lors d’une audition par le Conseil national de l’habitat, le ministre de la Ville et du Logement, Olivier Klein, a critiqué les banques pour avoir réclamé des changements alors qu’elles n’avaient pas exploité pleinement leurs marges de manœuvre. Cependant, la directrice générale de la Fédération française des banques a souligné que ces marges étaient en pratique inutilisables. Les banques doivent jongler entre le risque de dépassement, qui entraînerait des sanctions sévères, et la nécessité de remplir l’enveloppe des 20% de dérogations autorisées. Cette situation complexe est renforcée par le cloisonnement à l’intérieur de ces 20%, ce qui rend encore plus difficile l’évaluation du volume de clients et de dossiers dérogatoires.
Des mesures inappropriées et trompeuses
Le gouvernement a accordé un assouplissement en permettant aux banques de déplacer la cloison à l’intérieur des 20% de dérogations, réduisant ainsi la part des résidences principales à 70% au profit des achats de logements destinés à la location. Cependant, cette mesure ne sera pas plus utilisée que la précédente. Selon Buzy-Cazaux, la seule solution viable aurait été d’autoriser les banques à adopter une approche basée sur le reste à vivre plutôt que sur le taux d’effort. Les banques françaises ont déjà prouvé leur capacité à accorder des volumes importants de crédit sans surendetter les ménages. L’assouplissement accordé par le gouvernement est donc condamnable à deux niveaux : il est présenté de manière intellectuellement malhonnête comme une mesure forte pour relancer l’investissement locatif privé, alors qu’il ne produira pas les résultats escomptés, et il privilégie les tracasseries administratives au respect des compétences techniques.
Le coût de l’inaction
Buzy-Cazaux souligne les conséquences désastreuses de ces mesures inappropriées. En ne cherchant même pas à abaisser les barrières entravant l’accès au logement pour 40% des Français, le gouvernement ignore les problèmes réels auxquels sont confrontés les acteurs du logement. L’impact économique est également considérable, avec environ 100 000 à 150 000 personnes dans le secteur immobilier confrontées à une situation économique précaire, ainsi que des pertes de recettes fiscales importantes pour l’État et les départements.
Il est temps de revoir les mesures
Selon Buzy-Cazaux, il est impératif que le gouvernement revoie ses mesures et adopte une approche plus réfléchie pour faciliter l’accès au crédit immobilier. Plutôt que de se focaliser sur des mesures optiques et trompeuses, il est nécessaire d’autoriser les banques à utiliser des méthodes d’évaluation plus adaptées, comme l’approche basée sur le reste à vivre. En permettant aux banques de prendre en compte la solvabilité des emprunteurs de manière plus holistique, il serait possible de concilier l’accès au crédit avec des critères de prudence financière. Il est temps pour le gouvernement de faire preuve de responsabilité et de prendre des mesures qui répondent réellement aux besoins des acteurs du logement et de l’économie dans son ensemble.